•    A Virginie, en souvenir...

    Las mon coeur ne bat plus que pour rythmer la peine
    usant pour m'envahir du lacis de mes veines.
    Chaque battement ne propulse au sein de ce dédale
    qu'une bordée de mal-être au profil de vandale.
    Lui qui sût m'irriguer, par voie de mes artères,
    de ces passions hurlantes que la vie a fait taire.
    Lui qui sût m'affoler, battant si vivement
    lorsque nous fusionnions nos plaisirs fous d'amants...
     
    Mes mains n'attrapent plus que des poignées de vide
    qui ne sauraient suffire à me repaître, avide
    que j'étais de ta peau, où poser mes caresses,
    que j'étais de ton corps, à couvrir de tendresse.
    Et ce rien que je tiens assèche mes sentiments,
    me vide de mes envies, laissant place aux tourments.
    Mes doigts qui s'engourdissent sauront-ils reconnaître
    le plaisir du contact qu'un amour a fait naître ?
     
    Ma bouche ne s'ouvre plus que pour dire mon mutisme :
    les mots ne peuvent sortir, bloqués par l'ascétisme.
    Mes lèvres n'embrassent plus de peur d'humeurs amères;
    elles qui surent se poser en places qui t'enflammèrent.
    Ma langue ne me sert plus qu'à goûter l'amertume
    quand elle a tant aimé dévoyer tes coutumes.
    Mes dents ne peuvent plus que me mordre les lèvres;
    elles qui, de douces morsures, faisaient monter la fièvre...
     
    Las mon corps ne va plus, ne trouvant de raison
    à espérer qu'un jour revienne la belle saison...

     

    ©copyright JMA

    1 commentaire
  • Petit texte en vers que j'ai écrit pour participer à un concours dont le thème était "Légèreté", en 1000 mots... pas beaucoup de succès au concours, mais le texte me plaisait, alors je le pose ici

    Une lourde table en chêne, dans un jardin public.
    Un homme vient s'asseoir là. Il tient une blanche feuille:
    la pose sur le bois et la regarde, stoïque...
    Veut y mettre ses amours dont il a pris le deuil.

    Se prend la tête entre les mains. Par où va-t-il donc commencer ?
    Ferme les yeux, à la recherche des parcelles de ses souvenirs.
    Il en oublie la feuille, perdu dans ses pensées :
    Ce travail est ardu... Va-t-il y parvenir ?

    Et la brise légère soulève la feuille blanche
    qui glisse silencieusement entre les coudes de l'homme
    pour parvenir au bout de cette longue planche,
    zigzaguant au passage entre crayon et gomme.

    Là, riche de son élan, elle va prendre son envol,
    et la brise l'accompagne, l'entraînant vers un banc
    Une jeune femme y est assise : l'attrape en plein vol,
    semble lire le message invisible, posé sur le papier blanc.
    Elle est à peine entrée dans l'adolescence :
    dans un coin de la feuille, pose ses douces lèvres
    puis relâche sa prise, saisie par la violence
    de ce premier baiser, dont elle gardera la fièvre...

    La feuille, maintenant marquée de cet ovale rouge,
    reprend vite son envol, pour aller virevolter
    autour d'autres jeunes femmes et, avant qu'elles ne bougent,
    se coller à leurs lèvres, en une fougue survoltée...
    Aucune bouche ne la repousse,
    aucune dent ne veut la mordre,
    aucune voix n'appelle à la rescousse,
    aucune main ne cherche à la tordre...
    Puis, fière de ses exploits, elle décolle à nouveau
    mais semble rechercher maintenant autre chose,
    des émotions plus fortes, à un autre niveau
    que les simples baisers que ces lèvres proposent.

    La feuille, transportée par un vent plus audacieux,
    s'en va tournoyer au dessus de l'herbe tendre :
    Là, alanguie : une femme, au regard délicieux,
    et dont les yeux indiquent qu'il ne faut plus attendre...
    Alors la feuille fougueuse se colle contre ce corps :
    contact intime, le papier suit les formes souples
    et les courbes accortes, toujours avec l'accord
    de sa douce compagne d'un temporaire couple.
    Et le papier s'embrase de cette ardente fusion !
    Mais le vent de la vie en éteindra les flammes,
    séparera le couple après leur tendre union
    et la feuille qui repart maintenant vers d'autres femmes...

    Contre combien de corps se sera-t-elle frottée ?
    Et de combien d’étreintes se sera-t-elle enfuie ?
    Pourquoi se sauve-t-elle toujours d’un autre côté
    quand on veut la reprendre pour une nouvelle nuit ?
    La feuille veut rester libre, voler au grès des vents :
    Que seule la girouette décide de ses rencontres !
    Et que le moindre souffle l’enlève, dérivant,
    jusqu’à un nouveau corps, pour se coller tout contre…

    Toujours assis seul à la table, et les yeux clos,
    à la recherche, dans sa mémoire, de quelques traces
    d’un simple amour, plus qu’une passade, qui sorte du lot
    des aventures, trop vite passées, sans prendre de place…
    L’homme se souvient alors : comment s’appelait-elle ?
    Un si joli sourire, un si tendre minois.
    auprès de cette femme, a replié ses ailes
    Mais le vent de la vie le surveillait, sournois…

    La feuille va se poser auprès de cette jeune femme
    assise un peu plus loin, sur un banc, sagement,
    son regard bleu marine, empli de vague à l’âme
    laisse à tous deviner l’ampleur de ses tourments.
    Elle attend son amour, veut réchauffer son cœur
    refroidi et blessé par de viles expériences,
    retenter l'aventure, et en sortir vainqueur;
    mais, envers tous les hommes, développe une méfiance...
    La feuille, à ses côtés, va se faire aguicheuse :
    d'abord, dans ses yeux bleus, veut éponger les larmes,
    écarter de sa tête toutes idées pernicieuse
    pour enfin, peu à peu, lui faire baisser les armes :
    que ses lèvres, à nouveau, dessinent des sourires,
    que, de ses yeux d'azur, s'évacuent les brumes grises
    et que ses jambes retrouvent une envie de courir
    après cette feuille qui passe, transportée par la brise...
    Quand elle l'attrape enfin, en contemple la surface
    qui lui parait si blanche, si vierge en apparence
    mais elle croit remarquer des traces qui s'effacent :
    cherche au sein du papier, et de sa transparence.
    Elle découvre là les marques que d'autres ont laissées
    tout au long de la feuille, témoignages silencieux.
    Alors repose la feuille, et s'en retourne, blessée.
    Les nuages, à nouveau, viennent assombrir ses cieux...
    Mais la feuille voudrait tant qu’elle la reprenne, encore :
    espère un ouragan, qui la collerait contre elle ;
    mais le flot de ses larmes éloigne de ce corps
    ce radeau de papier qui a perdu ses ailes,
    et ne peut remonter ce courant qui l'écarte.
    Elle voudrait tant lui dire que pour elle, elle changera,
    se pliera à ses voeux : tous ! Pour ne pas qu'elle parte...
    Lissera sa blancheur, jamais ne se froissera...
    Alors la femme y croit : vient reprendre la feuille
    par un coin, prudemment, toujours prête à lâcher
    à la moindre incartade, prête à franchir le seuil
    sans appel s'en aller, à tout jamais fâchée...
    Mais comment résister même au plus doux zéphyr
    qui, sans difficulté, fit plier la fine page:
    toutes les promesses du monde n'auraient pas pu suffire
    à faire croire qu'il n'y aurait jamais d'autre dérapage...
    La femme relâche la feuille, sitôt prise par les vents,
    pour s'enfuir de ce parc, sans espoir de retour.
    Le papier tente, en vain, un ballet émouvant :
    l'éplorée disparaît, sans faire aucun détour...

    Alors la feuille déçue s'en va vers la fontaine.
    Dans les eaux translucides, décide de se noyer
    mais le vent de la vie séchera vite ses peines
    et vers d'autres jeunes femmes, l'enverra tournoyer...

    Puis la feuille s'en retourne à son propriétaire :
    toujours silencieusement, se repose sur la table...
    elle a bien retrouver toute sa blancheur austère
    sans garder aucune trace des amours regrettables.
    L’homme rouvre enfin les yeux lorsque décroît le jour.
    Entre ses coudes, la feuille, d’une blancheur livide,
    reflétant, dans sa vie, le poids de ses amours,
    Seul, au milieu d’un parc désespérément vide…

    ©copyright JMA

    1 commentaire
  • Petit texte en rimes, peut se slammer aisément !

    Que celui qui n'a jamais vécu de telles mésaventures me jette la première boîte de haricots verts...

     

    L'heure du repas enfin approche :
                en direction de la cuisine
    à grands pas, je frotte ma brioche
                tout en me léchant les babines.
    Que vais-je donc me préparer
                pour assouvir mon appétit ?
    Tous mes placards sont bien parés :
                toujours peur de prévoir petit...
    Dans mon frigo, des plats tout prêts
                juste à chauffer, la faim me presse.
    Je penserai grande cuisine après
                et je succombe à la paresse.

    Juste entrouvrir cet opercule.
                De plus, c'est « Ouverture facile ».
    Je pince le bord de la capsule
                entre deux doigts fermes et virils.
    Mais le couvercle me résiste :
                j'ai beau serrer, le plastique glisse.
    Je suis tenace, alors j'insiste
                et je découvre un nouveau vice...
    Un bout de plastique dans les doigts,
                le récipient toujours bien clos.
    « Ouverture facile », cela doit
                être l'exception de ce lot.
    Las, aux grands maux les grands remèdes,
                j'achève le couvercle à la lame
    et enfourne ce plat qui m'obsède
                au micro-onde, sans une larme !

    Pendant que se réchauffe mon plat
                me prend une vive envie de thon
    que j'apaiserai, sans pugilat 
                une simple boîte pour avortons
    avec anneau qu'il me suffit
                de tirer pour que le tout s'ouvre.
    Mais encore, c'est un vrai défit :
                deux ongles et rien ne se découvre...
    Alors ressort mon bon couteau
                qui glisse aisément sous l'anneau
    mais j'ai crié victoire trop tot :
                car l'anneau casse... je reste penaud :
    Il faut donc que je parte quérir
                mon ouvre-boîte, un peu rouillé
    qui j'espère, va pouvoir guérir
                mon envie sans trop me souiller...
    La boîte résiste fort à l'outil
                crachotant moult gouttelettes grasses
    m'ôtant l'envie d'être gentil
                et de lui accorder la grâce...
    Le micro-onde enfin m'appelle :
                concédant au thon un répit,
    je vais sortir la fine gamelle
                qui va combler mon appétit.
    Il faut maintenant que je l'ouvre :
                je glisse un doigt dans l'étroite fente
    et c'est alors que je découvre
                qu'elle regorge de vapeurs brûlantes !
    Mon plat va s'écraser au sol,
                se répandant sur mon carrelage
    pendant qu'une eau froide me console
                mais je ne pleure pas, j'ai passé l'âge...
    Une fois la douleur dissipée,
                je me rabat sur autre chose :
    dans un emballage tout fripé
                c'est du « sous-vide » qui tient la pose.
    Là encore: « Ouverture facile »,
                enfin, c'est ce qu'ils ont écrit :
    il suffit de tirer le fil,
                pas besoin de pousser de cri.
    Je tourne l'objet dans tous les sens :
                où donc se trouve le fil promis ?
    N'auraient-ils pas eu l'indécence
                dans ce lot de l'avoir omis ?
    Alors mon couteau je ressors
                lorsque soudain, je l'aperçois :
    mais il est monté sur ressorts
                et s'échappe toujours de mes doigts/
    Maintenant plus qu'un peu excédé
                j'éventre sauvagement le paquet
    peu honteux d'avoir tôt cédé,
                ne méritant pas le piquet...
    Et le sachet, alors si ferme,
                se ramollit, de mes doigts glisse,
    pour vider tout ce qu'il renferme
                généreusement là, sur mes cuisses...

    ...

    Allo Pizza arrive enfin :
                dans ses mains, une boîte en carton.
    Vais-je pouvoir calmer ma faim ?
               Rien n'est ouvert, pas même le thon...
    Il pose sa boîte sur ma table
                et très gentillement, il me l'ouvre
    peiné par mon air misérable
                et le souk qu'ici il découvre...

    Je hais les « Ouvertures faciles »
                qu' effrontément ces plats affichent
    et qui font vous sentir débile
                prêt à sortir le pied-de-biche...
    Pourquoi donner de faux espoirs
                à ceux qu'une grande faim tenaille
    et qui se retrouvent, tels des poires
                sans même que la boîte s'entrebâille...

     

    ©copyright JMA

    2 commentaires
  •  

    Deux jours sans me raser : j’abandonne la douceur.
    Peu m’importe que mes joues affichent une rêche noirceur
    car aucune tendre main ne va les parcourir,
    je ne m’inquiète pas d’assombrir mes sourires…

    Je n’ai goût au rasoir sans promesse de caresses
    et accorde à ma peau du repos, par paresse ;
    espérant que ces marques de ma virilité
    puisse réveiller l’envie de douces futilités
    car si certaines réclament à tout prix une peau lisse,
    il en est qui préfèrent un derme qui trop ne glisse,
    cette fière rugosité naturelle à tant d'hommes
    trait distinct que parfois il faut bien que l'on gomme
    pour leur paraître plus doux, pour leur sembler plus sage,
    à leurs yeux réussir l'examen de passage
    nous permettant peut être un jour, à notre tour
    de tester chez ces dames la douceur des contours...
    ...
    M'arrive un doux message, rendez-vous pour ce soir :
    sans tarder il me faut réveiller mon rasoir...

     

     

    ©copyright JMA

    votre commentaire
  •  

    Avoir le cœur qui s’accélère
           chaque fois que l’un à l’autre pense
    et s’amuser de ce mystère,
           en abuser, sans tempérance…
    A chaque pause, chaque rêverie,
           laisser les esprits se rejoindre
    et s’enlacer, sans minauderie
           jusqu’à pousser les corps à geindre…

    Comme pour un premier rendez-vous
           sentir grandir son inquiétude :
    peurs qu’à personne on n’avoue,
           comme si on avait l’habitude…
    La crainte de paraître gauche,
           par une erreur, trop tôt briser
    la trame de l’histoire qui s’ébauche,
           en rester presque paralysé…

    Où donc dois-je mettre mes mains ?
           A quel moment ouvrir la bouche ?
    Où vais-je trouver d’ici demain
           des conseils pour parfaire ma touche ?
    Ne va-t-il me trouver trop frêle ?
           Ne va-t-elle me trouver trop rond ?
    Faut-il que je mettes des dentelles ?
           Quelle couleur pour mon caleçon ?
      
    Tant de questions que l’on se pose,
           chacune chargée de tant de doutes.
    Mais au bout du compte, on ose
           et ensemble, sur cette douce route
    on parcourt un bout de chemin
           en oubliant les tracasseries
    bouche contre bouche, main dans la main
           en savourant ces griseries…
      
    Elle 39, et moi 40
    Deux nouvelles âmes adolescentes…

     

    ©copyright JMA

    2 commentaires